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Appel solennel du Prince Kum’a Ndumbe III pour sauver et consolider l’héritage

Devant de nombreux médias, le Prince Kum’a Ndumbe III a lancé un appel aux compatriotes africains et de la diaspora et aux citoyens de tous les continents pour sauver urgemment un héritage en péril constitué depuis 45 ans. La nécessité de la libération totale du continent africain, la consolidation de la dignité de l’homme noir et la prise en compte du destin commun de l’humanité sont les piliers de l’héritage qu’il lègue. 150 publications internationales, une bibliothèque, une maison d’éditions, une librairie, des archives de documents et de films, un lieu de rencontres pour des échanges créatifs, une fondation avec des sections internationales nécessitent un soutien engagé urgent.

Merci de prendre trente minutes pour lire l’itinéraire d’une vie, comprendre et agir

Minute de silence pour deux journalistes, fidèles à nos efforts de léguer un héritage : Prince René Douala Manga Bell, Stéphane Tchakam

Chers compatriotes d’Afrique et de la Diaspora,
Mes chers amis, chers sympathisants,

Voici ce que j’écrivis dans mon cahier intime le 1er novembre 1968 à Lyon en France, où j’étais en deuxième année d’université. Il y a longtemps, n’est-ce pas ? Mais lisez avec moi en ce 21 août 2013, puisque par vos mails et appels, vous me demandez ce qu’il faut faire pour ne pas fermer la Fondation AfricAvenir International que j’ai lancée en 1985. J’avais écrit ceci depuis ma chambre d’étudiant :

« Aujourd’hui, c’est, mon anniversaire. J’ai 24 ans et je voudrais savoir ce que moi, je pense de ma vie, soit ce que je veux faire de ma vie… Et pourtant, je ne peux jusqu’à l’heure actuelle attribuer un autre sens à ma vie que celui qui mène à la libération totale de tout le peuple africain, au respect de la dignité de l’homme noir et par tout ce processus à un apport personnel à l’humanité… Mais puisque c’est une conviction que j’ai depuis le cours élémentaire première année de l’école primaire, soit bientôt depuis 13 ans, cela semble avoir un peu de poids. Mais ce qui compte pour moi, c’est d’attendre. Attendre jusqu’à ce que j’aie réalisé ce but. Alors, je dirai : « Kum’a Ndumbe III, tu es un homme sérieux. Va, j’ai confiance en toi. » Mais pas avant. Et je me demande si jamais j’en arriverai là. Il faut que non seulement j’en arrive là, mais que je dépasse ce stade pour aller plus loin.
Quand je parle de libération de l’Afrique et du Noir, dans tout cela ; il y a l’amour, l’art, la religion, etc.… Une chose s’éclaircit donc : ma vie n’a de sens que dans la libération totale de l’Afrique. Je ne sais pas si j’ai bien exprimé ce que je ressens. Mais toujours est-il que cette formulation primaire s’améliorera de jour en jour et n’atteindra son expression finale qu’après ma mort…
Ce que je demande à moi-même, c’est de remplir ma tâche. Je suis entre le passé et l’avenir. Je suis donc situé indépendamment de moi-même. Il importe donc de faire son petit travail dans l’époque présente qui demain sera histoire. Comme il y a un problème concret de l’unification de l’Afrique (je signale que libération totale de l’Afrique suppose son unification) et du mépris éprouvé par certaines races à l’égard de la mienne, cette situation concrète m’offre donc une base de travail solide. C’est donc une base plausible.»

J’ai écrit ceci pour moi-même il y a donc 45 ans.

Une question m’a préoccupé tout le long de ma vie :
« Comment  a-t-on réussi à enfoncer les Africains et les Noirs dans un trou aussi noir et profond et que même en ce début de 21è siècle, ils arrivent difficilement à comprendre ce qui leur est arrivé, ils se plaisent à vivre dans un perpétuel génocide intellectuel et spirituel et se résignent à être les prostitués des autres ? ».

J’ai consacré ma vie  à chercher et à donner des éléments de réponse et à indiquer les voies pour une marche équilibrée des Africains et de l’homme noir dans la marche de l’humanité moderne. Grâce à la miséricorde divine, à la générosité de mes ancêtres, de parents et amis, voici l’héritage que moi, fils d’Afrique ouvert au monde, j’ai pu constituer jusqu’en cette année 2013 :

I.    La pensée et la vision du monde comme fondements de tout héritage

1.    Livres et articles

Mes écrits de 1958 à 1967 n’ont pas encore pu être retrouvés, mais la majorité de ceux rédigés de 1968 à 2013 ont pu être conservés. Si une bonne partie attend encore d’être publiée, il existe une liste d’environ 150 publications, livres et articles disponibles aujourd’hui de par le monde. Mes écrits scientifiques, qu’ils plaisent, déplaisent, soient combattus ou mis à l’index, ont une base scientifique solide. J’ai obtenu un baccalauréat maths–sciences allemand au « Lycée Impératrice Marie-Thérèse » de Munich en 1967 avec éloge, une licence en juin et une maîtrise en Etudes Germaniques en septembre 1970 à l’Université de Lyon II avec mention très bien, un doctorat en Etudes Germaniques et un doctorat en Histoire le même jour en janvier 1975 à l’Université de Lyon II avec mention très bien, un Diplôme Universitaire d’Etudes Générale en Administration économique et sociale en 1979 à l’Université de Lyon II et une Habilitation en Sciences Politiques en 1989 à l’Université Libre de Berlin obtenu avec la meilleure mention, « en première lecture et à l’unanimité du jury ».

C’est parce que j’ai bouleversé les thèses scientifiques qui existaient sur Hitler et l’Afrique que j’ai été admis à titre individuel, sur proposition du Professeur Pierre Léon de l’Université de la Sorbonne, comme premier Africain à siéger au Comité International d’Histoire de la Deuxième Guerre mondiale en 1974, alors présidé par Henri Michel, à côté d’éminents professeurs titulaires de chaires dans plusieurs universités dans le monde et de Généraux soviétiques, américains, canadiens, français, etc., je n’avais pas encore trente ans. Je n’ai donc pas de leçons scientifiques à recevoir de ceux qui aujourd’hui, par ce qu’ils gèrent des fonds colossaux, croient pouvoir décider de la valeur scientifique de mes travaux et font parfois tout pour que mes écrits ne circulent pas. J’ai eu le privilège d’enseigner à l’Université de Lyon II, à l’Université Catholique de Lyon, à l’Université Libre de Berlin et à l’Université de Yaoundé I. Mes étudiants, un jour, témoigneront.

Je sais que j’ai compris une chose essentielle : certains peuvent tolérer qu’un Africain excelle en sport ou en musique. Mais stop : pas dans le domaine de la pensée. Un intellectuel africain est très apprécié quand il accepte d’être l’élève pour ne pas dire l’esclave d’un maître issu de l’Occident, il est généreusement financé quand il met en application chez lui la pensée venu d’ailleurs et quand sur place, il devient le policier en chef pour que la recolonisation mentale de l’Africain soit assurée de manière durable par l’éducation, les structures publiques de son pays et par les donations privées. J’ai consciemment refusé ce rôle. Je suis un prince qui ne se vend pas et qui ne trahit pas son peuple, et je construis par la pensée.

Nous en avons assez de ce système de pensée qui s’appuie sur la domination et l’exploitation des autres, avec des discours lénifiants sur la paix, la démocratie et l’égalité des chances. Arracher aux autres ce que Dieu leur a donné, tout accumuler pour soi et faire des autres les esclaves mendiants même sur leur propre territoire, ce système de pensée a fait suffisamment de dégâts depuis le début de l’humanité. Avez-vous vu les images sur les massacres en Egypte, sur l’assassinat de Kadhafi, sur l’arrestation de Gbagbo ?

Avec les technologies sophistiquées disponibles en ce 21è siècle, laisser ce système de pensée guider la politique, l’économie, la science, la culture et la religion, c’est programmer consciemment une confrontation planétaire sans précédent qui pourrait mettre fin à l’existence de l’homme dans notre galaxie. Or des laboratoires entiers sont gracieusement financés dans le secret pour préparer et déclencher cette confrontation militaire apocalyptique. Ceux qui l’élaborent sont convaincus qu’ils écraseront les autres, qu’ils seront les heureux élus qui vont survivre et jouir sans concurrence ni partage de l’abondance des richesses divines disponibles dans la voie lactée. Je leur réponds : il n’y a pas qu’Hitler qui a pu se tromper.

Le 21è siècle a besoin de la pensée multiple, d’une ouverture créatrice menant à une pensée nouvelle capable d’aider l’humanité à se sauvegarder et à respecter la nature qui l’entoure et qui l’entretient dans la voie lactée, nous avons besoin d’une pensée qui permet de consolider les acquis de chaque peuple là où il vit, de partager et d’échanger librement avec les autres, une pensée qui se soucie avant tout de la promotion de chances pour les 11 milliards de personnes que nous serons d’ici 2100, une pensée d’abord soucieuse de la sauvegarde d’une paix durable pour l’humanité entière et non pas une paix temporaire et précaire pour quelques uns seulement.

|+| Publications du Prince Kum’a Ndumbe III 1971-2013

J’ai rédigé mes publications en français, en allemand, en duala et en anglais. Il s’agit de livres ou articles sur l’histoire, la politique, les relations et la coopération internationales, les conflits en Afrique, la déviation des économies africaines, le génocide intellectuel dans les écoles et universités africaines, le génocide spirituel et la mise en prostitution spirituelle des Africains et des Noirs dans les églises et mosquées.

A côté de ces publications scientifiques, j’ai eu la grâce de pouvoir parler aux cœurs par l’écriture littéraire. Vous trouverez ainsi des pièces de théâtre, des nouvelles, des poèmes, des romans, des contes que j’ai publiés en duala, en français et en allemand.

Avec ces écrits, je pense avoir contribué à un socle d’équilibre pour l’Africain et le Noir au 21è siècle, je pense avoir donné une modeste contribution à une nouvelle base fondamentale de la pensée pour le destin commun de l’humanité.

2.    Documents audio et vidéos

Des documents audio et audio-visuels qui expriment ma pensée à travers interviews radios, télé et documents sonores ou qui témoignent de mon expérience en Afrique, en Europe ou aux USA ont pu être rassemblés. Actuellement, une cinquantaine existent online et peuvent être utilisés. Ce sont plus ces documents que mes écrits qui ont attiré l’attention et la sympathie de la jeunesse en Afrique et dans les autres pays sur mon œuvre.

|+| Link des vidéos on youtube

II.    Création d’un espace de liberté de pensée et de créations : la Fondation AfricAvenir International sur 2300m2 à Bonabéri-Douala

Malgré tous les avantages d’un poste sûr à l’Université de Lyon II en France et les perspectives d’une carrière prometteuse, j’ai quitté l’Europe en 1979 pour commencer à donner ma modeste contribution à l’Université de Yaoundé en 1979. Pour rester au Cameroun, il ne fallait surtout comparer ni avec mon bulletin de paie français, ni avec les conditions de travail. Refuser le clientélisme politique et ethnique dans mon pays, tourner le dos à la course folle aux postes de responsabilité avec de gros budgets à détourner, accepter d’avoir juste de quoi vivre et chercher à créer un cadre pour une contribution fondamentale, voilà la direction ferme que j’ai eu à choisir.

En 1981, je suis élu Président de l’Association Nationale des Poètes et Ecrivains Camerounais (APEC), et je comprends très rapidement qu’en Afrique, pour être indépendant des hommes politiques et de leurs maîtres à l’étranger, il fallait créer un cadre privé pour l’articulation d’une pensée libre, indépendante des officines qui ne conçoivent l’Afrique que comme esclave, prostituée et champ d’exploitation économique, politique, culturelle et spirituelle. Avec un pauvre salaire d’enseignant camerounais, je décide en 1985 de créer le « Centre de créations et de recherche AfricAvenir » avec les « Editions AfricAvenir » sur les terres de mes parents à Bonabéri-Douala, sur 2300m2. Le bâtiment sera prêt en 1989, l’ensemble des activités sera transformé en fondation en 1993.

1.    La Bibliothèque Cheikh Anta Diop à Douala

Enseignant à l’Université de Yaoundé, je constate que les bibliothèques universitaires dans plusieurs pays africains sont une insulte grave à l’héritage scientifique millénaire de l’Afrique, elles se présentent comme un centre de déchets de l’Occident, se contentant souvent de dons de livres que même les bibliothèques occidentales n’utilisent plus et ont enlevés de leurs rayons pour faire place à des nouveautés scientifiques. Dans aucune discipline scientifique, l’étudiant camerounais et africain ne trouve de livres à la bibliothèque universitaire qui l’introduisent dans l’héritage scientifique de ses ancêtres. Les enseignants et les livres lui enseignent que ses ancêtres n’ont rien inventé de digne pour l’évolution et le progrès de l’humanité, que l’Occident est le seul recours pour sortir de la barbarie, du sous-développement et accéder à la science. Or dans mes déplacements pour les congrès internationaux, je visite régulièrement les bibliothèques universitaires, régionales et municipales et un constat s’impose : dans tous les pays et tous les continents, sauf en Afrique, les bibliothèques sont là pour témoigner de l’évolution de la pensée, pour retracer l’héritage scientifique et littéraire de la nation et de l’espace environnant, les références allant souvent avant la création de la dite nation.

Dans l’écrasante majorité des bibliothèques en Afrique, tout commence avec le temps de la défaite durable, du triomphe de l’Europe et de l’Occident sur les pays africains, de l’institutionnalisation du génocide intellectuel et spirituel des peuples africains imposé par l’Europe. Dans nos bibliothèques, la pensée des Africains ne commence à être articulée que vers la période de la Première Guerre mondiale, mais surtout après 1945, quand les Africains accepteront à abandonner l’articulation de la pensée dans leurs propres langues et seront fiers d’articuler leur pensée-perroquet dans les langues de l’occupant européen. L’étudiant africain apprend donc de l’école primaire à l’université que le savoir ne lui est pas propre, que la science, tout comme le salut, ne peuvent venir que de l’extérieur. Moi, l’Africain qui ait accumulé les diplômes scientifiques de l’Occident, allant du baccalauréat à l’habilitation allemands en passant par deux doctorats français, je n’ai pas compris cette barbarie scientifique que l’on imposait au peuple africain. Ne pouvant rien changer à l’université et dépourvu de pouvoir politique dans mon pays, j’ai décidé de créer une petite bibliothèque représentative qui permettrait à l’utilisateur de retrouver les racines scientifiques africaines. C’est ainsi qu’est née la Bibliothèque Cheikh Anta Diop au sein de la Fondation AfricAvenir International à Douala, pour rendre hommage à ce grand savant sénégalais qui a bouleversé les donnes de l’histoire et de la science en Afrique et dans le monde.

Aujourd’hui, la Bibliothèque Cheikh Anta Diop dispose de deux sections. La « section recherche » abrite plus de 7000 livres spécialisés sur l’évolution de l’Afrique et sur les convoitises des autres sur le continent africain. Ces livres sont dans les langues africaines, en français, en anglais, en allemand, etc.... La « section jeunesse » avec plus de 1.000 livres offre des collections illustrées dans lesquelles les enfants et jeunes africains peuvent se retrouver, tout en leur donnant la possibilité de découvrir les livres de leur tranche d’âge des bibliothèques de l’Occident. C’est un plaisir de voir comment les élèves, après l’école, sur le chemin de retour à la maison, se ruent sur la section jeunesse de la Bibliothèque Cheikh Anta Diop, parce que leurs écoles et lycées ne leur offrent pas ce genre de lecture. Faire vivre cet espace, créer des animations autour, le conserver et le promouvoir, voilà une contribution essentielle à notre héritage collectif.

|+| vidéo sur les élèves à la Bibliothèque Cheikh Anta Diop à Bonabéri

2.    La maison d’éditions AfricAvenir/Exchange & Dialogue

Etre Africain, publier dans les réseaux autorisés en Occident, être distribué et diffusé par ces réseaux dans le monde et ne pas être connu ou lu en Afrique, voilà le dilemme de tout écrivain africain soucieux de donner sa contribution à la renaissance de l’Afrique et à la marche du monde. Quand dans les années soixante dix mes livres sortaient en trois mille exemplaires à Paris, je transportais toujours cent exemplaires pour les distribuer dans les librairies et chez les amis au Cameroun. La question me taraudait à chaque publication : mais pour qui est-ce que j’écris ? Pour les Européens ou pour les Africains ? Et comment moi, Africain conscient qui écrit pour contribuer à la libération totale de l’Afrique, je dois frapper à la porte d’un Européen pour demander le droit de prendre la parole et de dire mon message qui ne leur plaira pas? J’ai compris alors que moi-même je me trouvais pris dans le piège de la coloniale.

Rentré au Cameroun en septembre 1979, je consacre mes efforts à publier sur place. Mais la censure sur les livres est forte. Chaque manuscrit doit d’abord être présenté au ministère de l’intérieur. Président des Ecrivains du Cameroun, je m’oppose publiquement à cette mesure. En 1983, je lance un « Appel à l’intelligentsia créatrice camerounaise » et en 1985, avec des amis, nous créons la maison d’éditions AfricAvenir. Nous n’enverrons aucun manuscrit à la censure.

Je publie ainsi en 1985 mon premier livre au Cameroun, « L’Afrique relève le défi – projet pour un partage communautaire moderne ». Imprimé en cinq mille exemplaires, le livre est épuisé avant un an. Ce livre aurait-il même été accepté par un éditeur français ? Un signal fort. Mais les turbulences politiques des années 1990 font arrêter l’expérience qui ne reprendra qu’en 2002. Je me suis toujours posé cette question : Si Alioune Diouf, le Sénégalais, n’avait pas ouvert la maison d’éditions et la librairie « Présence Africaine » à Paris, qui aurait publié, qui aurait diffusé les travaux de Cheikh Anta Diop ? Aurions-nous connu ce célèbre savant pluridisciplinaire, puisque les Européens ne voulaient pas de ses résultats de recherche ?

Les Editions AfricAvenir/Exchange & Dialogue sont basées à Douala, avec des antennes à Berlin et à Vienne, une distribution à Paris et bientôt en Amérique du Nord. Notre ambition est de donner la parole à tous ceux qui, Africains ou pas, ont compris que l’Afrique est en marche. Et le message doit aussi et surtout être imprimé dans les langues africaines, avec de beaux livres illustrés en duala, ewondo, kikongo, fulfulde, haoussa, etc. pour nos enfants. Il faut consolider cet héritage.

|+| liste des 125 auteurs publiés/Liste des titres publiés (pdf)

3.    Le Génie africain, librairie et artisanat africain

Quand j’ai été élu Président de l’Association des Poètes et Ecrivains Camerounais en 1981, je me suis rendu avec une délégation de notre comité directeur dans les librairies de Yaoundé, la capitale, pour voir comment les auteurs camerounais et africains y étaient représentés. A la librairie la plus prestigieuse de la capitale, la dame qui nous a reçus nous a répondu : « Ici, nous ne faisons pas d’auteurs africains ». Dans les autres librairies, on nous signifiait : « Allez au fond là-bas, sur le rayon plus bas, vous trouverez quelques auteurs africains.» Aujourd’hui, à Douala, Yaoundé, Bafoussam, Garoua, les librairies ouvrent en août, septembre et octobre pour vendre les livres scolaires, importés d’Europe pour la plupart. Après, elles se transforment en papeterie scolaire ou vendent carrément de la brocante, ces déchets ramassés des trottoirs de l’Occident pour inonder le secteur informel des pays africains.
Quand la construction du bâtiment d’AfricAvenir a été achevée en 1987 et que les activités ont pu y être regroupées en 1989, un grand espace a été consacré à la librairie avec une maison de la presse internationale. L’expérience a tourné court quand au Cameroun la lutte pour le pouvoir politique a crée des camps radicaux avec une chasse aux sorcières sans merci. Il a fallu fermer en 1992.
En 2011, nous avons  réouvert un espace, « Le Génie africain », avec l’ambition de présenter au public de la capitale économique les courants de pensée des auteurs africains, de la diaspora africaine et des auteurs non africains apportant des contributions fondamentales. Après la rentrée scolaire, la librairie continue, et les artisans présentent leurs créations. Cette expérience toute récente au sein du siège de la fondation AfricAvenir International doit d’abord faire ses preuves pour devenir un jour partie de l’héritage. 

4.    Instruire et divertir par le film africain : soutenir un héritage didactique

Quand j’enseignais les sciences politiques aux étudiants allemands de l’Institut Otto-Suhr à l’Université libre de Berlin, j’ai commencé à faire projeter les films africains pour les aider à se rapprocher des réalités africaines dans leurs études théoriques. L’efficacité a été si grande que les étudiants ont eux-mêmes fait des programmations de films africains en ville, ils ne me sollicitaient plus que pour l’ouverture solennelle. Depuis l’an 2000, ces programmations continuent à Berlin grâce à la section de Berlin d’AfricAvenir International dirigée par mes anciens étudiants, tout comme à Windhoek où un de mes anciens étudiants allemands de Berlin s’est installé.

Au Cameroun, la fondation AfricAvenir International a emmené le film africain dans les écoles, dans les villages et dans les universités. Ce fut toujours un succès mémorable. Le siège de la fondation AfricAvenir International a collecté plus de 120 films africains et la possibilité d’avoir un accès au stock de plus de 800 films africains collectionnés par la New York African Film Festival existe aujourd’hui. Le film africain comme outil pédagogique et didactique pour les populations africaines, pour les écoles et universités devrait être intégré dans les programmes d’éducation scolaire et extra scolaire.

5-    La diffusion de la pensée et d’une vision du monde par les nouvelles technologies de l’information : création des pages web www.africavenir.org et www.exchange-dialogue.com

Un jour de l’an 2000, quelques étudiants allemands m’interpellent après le cours à l’Institut Otto-Suhr des Sciences Politiques de Berlin : « Professeur, vous nous dites des choses que nous n’avons pas entendues depuis le jardin d’enfants, et quand nous allons à la bibliothèque universitaire, nous ne trouvons pas les livres d’auteurs africains que vous nous recommandez. Il n’y a que les auteurs allemands, européens ou américains qui écrivent sur l’Afrique. Ne pensez-vous pas qu’il serait mieux de créer une page Internet pour diffuser votre pensée et permettre aux étudiants d’autres universités d’accéder à ces documents difficilement trouvables ? » Pendant deux semestres, je donne alors un cours sur « Architecture et création d’une page Internet sur la renaissance de l’Afrique ». Les bases théoriques sont jetées, ces étudiants allemands de sciences politiques achètent des livres sur la création d’une page Internet et un jour, m’envoient un mail : «  le site d’AfricAvenir est sur le net. Tapez www.africavenir.org. Si vous deviez nous payer pour tout ce travail, vous seriez déjà ruiné ! »

Ce sont certains de ces anciens étudiants allemands, aujourd’hui haut responsables dans différentes structures, qui gèrent bénévolement ce site et la section de Berlin d’AfricAvenir International jusqu’en cette année 2013. Et quand je m’en étonne, ils me répondent : « Votre travail n’est pas seulement pour l’éveil de l’Afrique, mais pour le destin commun de l’humanité. Nous aussi, nous sommes profondément concernés. » Mais le bénévolat a ses limites, la tâche est devenue écrasante, il faut une véritable banque de données pour élargir et sauvegarder l’héritage.

Le deuxième site www.exchange-dialogue.com cherche encore un professionnel pour animer les travaux des auteurs publiés par la maison d’éditions AfricAvenir/Exchange & Dialogue. Il a encore un bon bout de chemin à faire pour que ses ouvrages puissent être acquis n’importe où dans le monde grâce aux nouvelles technologies de la communication et au paiement de livres sur le Net.

6.    L’espace de rencontres et de dialogue

Depuis 1993, une salle de 150 places accueille des rencontres, des conférences, des séminaires, des expositions, des projections de films et vidéos, des performances musicales ou de théâtre, des lectures publiques d’écrivains. C’est l’espace le plus connu et le plus fréquenté du siège de la fondation AfricAvenir International à Bonabéri-Douala. Il accueille depuis quatre ans la section jeunesse de La Bibliothèque Cheikh Anta Diop. Les jeunes ont ainsi la possibilité de côtoyer des personnalités civiles et royales dont ils n’entendent parler qu’à la radio ou à la télévision. Le Prince René Douala Manga Bell aimait de son vivant s’entretenir avec les jeunes qui venaient lire dans cette salle ou qui s’adonnaient à des concours dans leurs langues nationales respectives.

III.    L’expansion de l’idée et de la pensée par les antennes internationales

Avant de quitter Berlin en 2003, mes anciens étudiants et des sympathisants avaient décidé de créer en ville une antenne de la Fondation AfricAvenir International pour continuer le travail que nous faisions seulement au sein de l’Université Libre de Berlin. Des projections de films africains, des conférences, des performances artistiques, des expositions d’oeuvres d’art d’Africains ou sur l’Afrique sont organisées régulièrement par cette antenne dynamique de Berlin.
En Namibie, un de mes anciens étudiants allemands de l’Université Libre de Berlin qui s’y est installé a aussi mis sur pied une antenne de la Fondation AfricAvenir International à Windhoek. Un gros travail a été abattu pour créer une banque de données du film namibien, et la projection de films africains tout comme la co-organisation de festivals du film africain dans d’autres pays africains comme en Egypte ont imposé le respect de ce travail abattu depuis Windhoek.

Le travail sur la pensée africaine dans les écoles de Vienne en Autriche a fait son chemin. Les échanges entre lycées autrichiens et camerounais ont été encouragés par l’antenne de Vienne de la fondation AfricAvenir International. La mise en scène d’une de mes pièces de théâtre en allemand, « Das Fest der Liebe », montée par le lycée Marchettigasse à Vienne, grâce au soutien du Ministère fédéral autrichien de l’Education, des Arts et de la Culture et de la Commission autrichienne de l’UNESCO, a franchi les murs scolaires pour être montrée dans un théâtre de la capitale autrichienne et dans la ville touristique de Bad Ischl. Ce ministère autrichien a même organisé un séminaire national, invitant professeurs et inspecteurs des lycées et universités, à venir découvrir l’œuvre de onze livres en allemand de l’écrivain africain Kum’a Ndumbe III. La coordination de la maison d’éditions AfricAvenir/Exchange & Dialogue est aussi gérée surtout depuis l’antenne de Vienne.

Et que dire de nos correspondants, comme en Corée du Sud, qui font traduire et publier mes textes aussi bien sur Internet que dans des revues éditées en coréen et qui font connaître le travail de la Fondation AfricAvenir International par leurs sites web?

Ce travail de nos antennes internationales est bien visible sur le site Internet de la fondation.

IV.    La reconnaissance internationale de l’héritage

L’attention de certaines structures ou groupes de personnes a été attirée par notre travail au niveau international.

  • En mai 2007, AfricAvenir International a remporté la distinction du « meilleur site Internet camerounais – catégorie ONG» de la Fondation Ngallé, à l’Hôtel Hilton de Yaoundé.
  • En décembre 2008, le « Trophée africain de la citoyenneté – catégorie Arts et culture » a été remis au Prince Kum’a Ndumbe III à Cotonou au Bénin.
  • A Berlin, l’UNESCO a décerné la médaille Toussaint Louverture à AfricAvenir International en 2008 pour le travail fait sur l’exposition « 200 Years later… »  sur la résistance contre l’esclavage.
  • Le parlement de la communauté francophone de Belgique a décerné à l’antenne d’AfricAvenir de Berlin le « Prix Condorcet-Aron pour la Démocratie – catégorie Prix de la réalisation étrangère » en septembre 2009.
  • En avril 2013, le Prince Kum’a Ndumbe III a été introduit dans le panthéon des célébrités mondiales à Atlanta, aux USA. Ensuite, il a reçu en plus le Prix du « Savant 2013 en Culture et Héritage ». Ces prix ont été décernés par la A.D. King Foundation et la African Diaspora World Tourism Awards. 

Alors, fermer le siège de la Fondation AfricAvenir International à Douala?
En ce mois d’août 2013, j’ai essayé de brosser un tableau rapide de l’itinéraire qui m’a conduit à constituer un héritage scientifique et littéraire et à créer au Cameroun une Fondation avec mes petits fonds propres. Cela a donc été possible, au risque souvent de perdre la vie, et au détriment de mes enfants qui ont souvent dû accepter de vivre dans le besoin. Mais le résultat est là, palpable, utilisable.

  • 150 publications scientifiques et littéraires en quatre langues
  • Une bibliothèque de recherche avec une section jeunesse, une section archives et une section cinéma africain
  • Une librairie avec artisanat
  • Une maison d’éditions
  • Un espace pour l’expression artistique, le film et le théâtre
  • Une fondation internationale

Voilà l’héritage constitué par ma volonté et mes modestes moyens que Dieu a bien voulu mettre à ma disposition.

Aujourd’hui, J’ai confectionné un plan d’extension pour les 7 prochaines années, 2013-2020, avec le projet d’un bâtiment de cinq étages consacré à la vision d’une Afrique en renaissance. Mais il faudrait d’abord consolider les acquis et les rendre accessibles aux utilisateurs avec professionnalisme. Quand parfois l’électricité, parfois l’Internet, parfois l’eau sont coupés pour défaut de paiement de facture, que faut-il expliquer à tous ces enfants qui viennent lire à la bibliothèque et veulent souvent boire tout simplement un peu d’eau ? Et que dire aux employés attendant de maigres salaires qui arrivent avec tant de peine et de retard? Ne me dites plus qu’il ne faut pas fermer la Fondation AfricAvenir Internationale, et vous me laissez toute la responsabilité et toute la charge.

Je ne peux plus sponsoriser le million de francs CFA (1500 EURO) par mois, je n’en ai plus les moyens, et mes nombreuses démarches auprès des autorités au fil des années n’ont pas pu aboutir. J’ai crié comme dans un désert, pendant plus de vingt huit ans. Mais je suis sûr d’une chose : l’Afrique va relever le défi, avec ses 2,4 milliards d’habitants d’ici trente sept ans seulement, en 2050, selon les projections des Nations Unies publiées en juin 2013. L’Afrique va relever le défi avec ses ressources généreuses que le Créateur a placées sur le continent et que les Africains sauront défendre héroïquement. En 2100, les Africains seront 4,2 milliards de personnes sur une planète de 10,9 milliards d’habitants. Et les nouvelles bombes qui tuent toute vie humaine en laissant intact immeubles et infrastructures ne viendront pas non plus à bout de toute cette population. L’Afrique se prépare et va riposter. A méditer. Par chacun.
Je peux dire devant mon peuple et devant le monde que j’ai essayé. Que les citoyens de bonne volonté sauvent l’héritage s’ils le jugent pertinent, que ceux qui dirigent, décident et gèrent les budgets ne disent pas un jour qu’ils ne savaient pas. Ils ont la capacité d’agir, et l’histoire retiendra leurs actes.
J’ai fait ma part, et je rends grâce à Dieu. Que cet appel soit entendu, touche les cœurs et pousse à l’action constructive.

J’ai dit !

Le Prince des Bele Bele
Prince Kum’a Ndumbe III
Professeur Emérite des Universités

Bonabéri-Douala, le 21 août 2013

|+| Recommandations d’action: Mesures pour sauver, consolider et promouvoir les acquis du siège de la Fondation AfricAvenir International à Douala pour une Afrique debout et digne

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